[long] Re: essais du Secam

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Sujet : [long] Re: essais du Secam
De : olivier.2a (at) *nospam* free.fr (Olivier B.)
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Date : 21. Mar 2024, 19:10:09
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Le 19/03/2024 à 09:14, François Guillet a écrit :
Olivier B. a écrit :

https://www.academia.edu/35230296/Chap_I_SECAM

_Ce texte ne confirme aucun essai 819 lignes couleur réel et à grande échelle sur le réseau en service en France, ce qui était prétendu._
 
Pur argument d'autorité, mais je persiste, les tests *labo* du SECAM 819 ayant débuté en 1950 par *Henri de France*, l'ordre donné non pas à ce même labo mais cette fois ci à la *RTF* 8 ans plus tard porte à l'évidence sur des essais en conditions réelles, sinon cela n'aurait eu strictement aucun sens! Et cela recoupe parfaitement avec l'information YouTube référencée d'entrée par Pascal "Les premiers essais techniques en couleur SECAM en 819 lignes ont eu lieu sur l'unique chaîne de la RTF à partir du mois de décembre 1961". On est ni plus ni moins en présence de deux sources concordantes CQFD.
Et il me semble parfaitement logique que ces essais visaient précisément à sortir le secam 819 des labos afin de le tester sur la chaîne, l'objectif étant non seulement de démontrer aux autre pays que les infrastructures existantes étaient capable de diffuser correctement le signal 819 couleur vers des récepteurs expérimentaux, mais aussi que le choix fait de 7,25MHz en terme de sous porteuse chroma ne provoquait de défauts sur les récepteurs noir et blancs déjà commercialisés, puisque on sait que la compatibilité avec l'existant était un des enjeux majeurs, s'agissant alors de faire adopter ce standard par ces autres pays.
Mais les deux sources montrent que ces essais ont été réalisés sur le tard, alors que le standard était politiquement déjà mort et aurait conduit la France dans une impasse, probable raison pour laquelle ils n'ont pas significativement marqué l'histoire.
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Non seulement tu n'as aucune connaissance de l'histoire de la télé, >
Ce ne sont pas mes connaissances que tu réfute Guillet, mais deux sources concordantes, la première référencée par Pascal pour laquelle tu taxe l'auteur d'incompréhension du contexte, une deuxième fournie par moi même que tu la balaye pour ton bon plaisir de m'insulter, à se demander si tu en as seulement lu une ligne, on peut en douter.
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mais en plus tu mets ton ignorance au service de la malhonnêteté en suggérant que ce texte irait dans  ton sens. Tes amalgames n'impressionneront que les imbéciles, eux seuls peuvent te croire compétent.
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Insulter à priori toute personne qui ferait la même lecture que moi de ce texte relève de la manipulation grossière.
Pour ceux qui n'auraient pas accès au texte le voici ci-dessous, le le trouve tant utile qu'agréable à lire :-)
CHAPITRE IV
DE GAULLE ET LE SECAM
Au début des années 1950, Les pays européens ne font preuve d’aucun empressement pour passer à la couleur. Il faut d’abord reconstruire et édifier le premier réseau en Noir et blanc cela prend du temps, avance lentement. Et puis, de ce côté de l’Atlantique, il n’y a ni FCC, ni ETSC, « European Televsion System Comitee » pour piloter le processus de choix.
Alors, pour confronter les points de vue des uns et des autres, et évaluer les différentes options possibles, le CCIR prend l’initiative de créer dés 1955  un groupe de travail consacré au sujet. Émanation de l’Union internationale des télécommunications, le CCIR n’a pas le pouvoir d’imposer des normes aux États. Il peut seulement les enregistrer, les publier, veiller à leur fiabilité, mais il ne peut rien imposer sans l’accord de ses membres. C’est un lieu où peuvent s’installer des rapports de force, se jouer des tactiques de négociation, de faire et se défaire des alliances. C’est aussi une scène où apparaissent les résultats de toutes les discussions et tractations menées dans les coulisses, et ou  les positions se cristallisent. D’ordinaire, les débats sont techniques et industriels. Chaque camp défend son invention, protège ses brevets, cherche à convaincre du bien-fondé de sa proposition. Bien sûr, il existe, dans cette communauté d’experts et  de techniciens, formés à la recherche de l’excellence, le désir profond de parvenir à la « meilleure solution », la combinaison de formules et de composants qui répond le plus parfaitement au problème posé ; car il en existe forcément une. Beaucoup d’entre eux espèrent aussi aboutir à un choix unique, universel, susceptible de faciliter le progrès économique et les échanges entre les hommes. Il y a de l’irénisme caché dans chaque ingénieur. Il a y aussi  l’amour-propre de l’inventeur, la volonté de puissance de l’industriel. Toutes ces ambitions, tous ces sentiments, tous ces raisonnements se mélangent, se combinent, se percutent, se conjuguent dans le creuset des réunions internationales. Et dans l’affaire de la télévision en couleur européenne, viendront s’y entrechoquer les stratégies politiques des nations et les tactiques diplomatiques. Dans une première période, jusqu’au début des années 1960, les protagonistes travaillent, expérimentent, comparent et observent. En France,  dans les années 1950, la couleur est considérée comme un luxe. Le général Marien Leschi, patron des services techniques de la RTF, se lance dans la prédiction:  « Il en est de la télévision comme de l’automobile. La création d’une voiture sensationnelle à turboréacteur n’empêche pas, en 1956, le public d’acheter la voiture classique, petite ou grande, de son choix… la télévision en couleurs ne supplantera pas , en France, les émissions en Noir et Blanc. »  Une telle déclaration prête à sourire aujourd’hui, et beaucoup de techniciens ont pu ensuite se gausser du manque de clairvoyance du général. Mais à l’époque, beaucoup d’indices pouvaient laisser penser que le noir et blanc ne disparaîtrait pas rapidement. Les ventes de récepteurs aux Etats-Unis ne décollaient pas, notamment parce que les postes étaient extrêmement chers. En Europe, les organismes de télévision consacraient leurs maigres ressources à la construction d’un premier réseau en noir et blanc, et ils n’avaient pas les moyens d’investir dans un nouveau matériel avant que les équipements noir et blanc ne soient amortis. De surcroît, le seul standard opérationnel, le NTSC ne donnait pas entière satisfaction. Les signaux de chrominance, qui étaient parfaitement transmis à l’intérieur des studios, adoptaient d’étranges comportements dés qu’ils étaient émis par une station et reçus par un récepteur. Car le trajet entre l’antenne de l’émetteur et l’antenne du récepteur n’est jamais un long fleuve tranquille.
Le signal subit de multiples altérations, provoquées par les réflexions sur les obstacles naturels ou artificiels, les interférences avec d’autres émissions, les parasites domestiques et industriels, les bruits radioélectriques et il n’arrive jamais intact à destination. Une image en noir et blanc qui subit une telle épreuve arrive altérée sur le petit écran. Mais pourvu que certaines précautions soient prises, et si le signal « utile » est assez fort, il reste dans la plupart des cas regardable. Malheureusement, le signal de chrominance n’est pas aussi robuste. Affecté par certaines de ses distorsions, il lui arrive de changer de couleur, ce qui n’est pas supportable. Et comme les perturbations varient dans le temps, la couleur peut elle aussi changer. Voilà pourquoi les détracteurs du NTSC avaient détourné l’acronyme. Par dérision, ils déclinaient  NTSC  en :  « Never Twice The Same Color » ; jamais deux fois la même couleur.
Voilà ce qui rendait le général Leschi dubitatif. Il n’était pas le premier et il ne sera pas, loin de là le dernier, à prendre le risque du pronostic en matière de nouveauté technologique. C’est un exercice impossible que de prévoir la vitesse et l’ampleur de l’adoption d’un nouvel outil de communication par le public. D’ailleurs, certaines machines ne sont jamais adoptées, comme le LaserDisc par exemple. D’autres, discrètement cachées dans une norme par un ingénieur qui pensait que cela pourrait servir un jour, deviennent, par surprise un phénomène social global, comme le SMS. Certains sont nés pour réussir, mais il manque une pièce dans le puzzle pour que la mayonnaise prenne. La Haute définition n’était possible ni en 1938, ni en 1949, ni en 1986, car il manquait l’écran plat. Beaucoup sont nés pour autre chose que ce à quoi ils servent finalement, comme Internet. Face à ce désordre, les observateurs tentent de formuler des règles empiriques. Par exemple, on croit déceler que la vitesse de pénétration a tendance à augmenter au fur et à mesure de la succession des générations. Ou bien que souvent, il y a à l’origine une phase d’engouement excessif, puis la déception s’installant parce que cela ne va pas aussi vite et aussi loin qu’on l’avait espéré, on se met à ne plus y croire, au moment même ou la nouveauté s’installe et se développe. Y croire ou ne pas y croire ? C’est finalement la question vers laquelle tous les experts sont ramenés face à l’émergence d’une nouvelle technique de communication. Combien de fois n’a-t-on pas entendue cette interpellation : vous y croyez, vous, à la TNT ?
Marien Leschi ne croyait pas à la couleur. C’était son droit et d’ailleurs, il avait un peu raison. La couleur ne disparaître à l’émission qu’en  1983, avec l’extinction du réseau 819 lignes. Et des récepteurs Noir et blanc étaient toujours vendus dans les boutiques en….
Les premières équipes techniques de la RTF sont plus prudentes. Elles savent, comme Louis Goussot,  l’un des premiers grands ingénieurs de la RTF, polytechnicien de la promotion 1937, que le jour de la couleur viendra. Et elles représentent la France aux réunions du CCIR. Dans ce cadre, le tout jeune service des études de la  RTF reçoit en mars 1956, une centaine de délégués représentant vingt pays auxquels elle présente, les systèmes étudiés en France. Ces démonstrations ont lieu dans un des nouveaux studios de télévision du centre des Buttes-Chaumont, baptisé centre René Barthélemy. Plusieurs équipes sont invitées à exposer leurs idées :  le système à échantillonnage des couleurs de Georges Valensi ; le système double messages du professeur Boutry du Laboratoire d’Electronique et de physique appliquée ; le système à deux sous-porteuses de la Société Philips ; le système "séquentiel simultané" d’Henri de France. Les équipes techniques de la jeune RTF, constitution ne commenceront cependant à jouer un rôle actif dans la mise en exploitation de la télévision en couleur que progressivement.
C’est en effet encore du secteur privé que vont venir les premières initiatives sérieuses de développement de la télévision en couleur en France. Les équipes de la CdC ont été dissoutes, le matériel vendu, et René Barhélemey, devenu académicien, a été contraint  de quitter la compagnie, qui le pousse dehors sans élégance. On mute sa secrétaire sans le prévenir ; un chauffeur lui apporte chez lui, à Fontenay, les affaires personnelles qu’il conservait dans on bureau ; on lui mégotte sa dernière prime de participation aux bénéfices. Dépité, il se retire dans sa petite maison d’Antibes, ou il meurt en 1954 de la maladie dont il a souffert toute sa vie. À l’extrême fin de son existence, il entretient une correspondance suivie avec Maurice Ponte, qui songe à lancer la CSF qu’il dirige, sur le marché de la télévision. Fusionnée avec Thomson, la vielle compagnie sans fil d’Émile Girardeau deviendra un puissant groupe industriel, présent sur tous les marchés internationaux.
Des grands pionniers d’avant-guerre, Henri de France reste le seul à poursuivre des recherches. Marc Chauvierre est devenu un industriel du récepteur, qui de déboires en initiatives heureuses, le conduira à participer à la construction  d’une grande usine à Montville, près de Rouen, qui emploiera jusqu’à 1000 personnes en 1967. Il restera un observateur et commentateur avisé des progrès techniques de la télévision. Henri de France commence ses recherches sur la couleur en 1949. Il réalise cette année-là une première démonstration du système CBS, au théâtre des Ambassadeurs. Comme on l’a vu, l’un des inconvénients du système CBS était sa trop grande occupation du spectre des fréquences. Mais en France, les canaux taillés pour le 819 lignes, d’une largeur de 14 Mhz pouvaient facilement accueillir  les signaux du procédé américain. Son abandon piteux par les américains eux-mêmes a cependant conduit à renoncer à cette solution. Henri de France se met alors, au début des années 1950, à travailler à l’amélioration du NTSC. Son idée de base est assez simple. L’œil se contente d’une définition deux fois moins précise pour les signaux de couleur que pour le signal de luminance, celui qui transporte l’image en noir et Blanc. Il n’est donc pas nécessaire de transmettre sur chaque ligne les deux signaux de couleur. On peut transmettre l’un des signaux de couleur, par exemple le « rouge »  sur les lignes paires et l’autre, le « bleu »  sur les lignes impaires. Pour reconstituer un signal complet avec ses trois composantes, il suffira de répéter sur une ligne paire  le « bleu » de la ligne précédente, et sur une ligne impaire, le « rouge» de la ligne précédente. Mais mettre en pratique cette idée n’est pas si simple, car il faut conserver, pendant la durée d’une ligne le signal de la ligne précédente, ce qui représente un défi technologique sérieux. La mise en mémoire de signaux a été pour la première fois réalisée par les concepteurs du radar. L’utilisation de ce dispositif permettait d’améliorer la détection, en atténuant les effets de réflexions parasites, en particulier par les obstacles fixes. Un Américain, Presper Eckert est à l’origine de ces développements. Dans l’immédiat après-guerre, la ligne à retard, intégrée dans les premiers ordinateurs, comme l’UNIVAC en 1951, jouera le rôle de mémoire. Pour fabriquer une ligne à retard, on ne peut pas se contenter de faire parcourir au signal une distance plus longue, par exemple, en le faisant transiter dans un câble. Car si signal électrique  se propage à moins rapidement dans un câble coaxial que dans le vide (ou sa vitesse est de prés de 300 000 Km/s), il est nécessaire de disposer sur le trajet un câble de plusieurs dizaines de mètres de longueur, pour obtenir le retard égal à la durée d’une ligne, soit 64 microsecondes. Marc Chauvierre se souvient que les premières lignes à retard utilisées dans les montages expérimentaux d’Henri de France étaient enroulées dans une boîte cubique de 50 centimètres de côtés.Pour réaliser des composants moins encombrants, l’astuce consiste à  transformer l’onde électrique en onde acoustique, qui se propage beaucoup moins rapidement dans un milieu matériel, puis à la retraduire un signal électrique à la sortie du dispositif.  Pour l’UNIVAC, Eckert utilisait une colonne de mercure enfermée dans un cylindre. L’acier, le verre, le quartz serviront également de milieu « retardateur ». La transduction des signaux étaient effectuées grâce à l’effet piézo-électrique. La technologie progressera lentement et Les premières lignes à retard équipant les téléviseurs couleur de première génération, au début des années 1960, finiront par avoir la dimension d’un morceau de sucre. Le premier procédé de télévision en couleur mis au point par Henri De France, et pour lequel il dépose un brevet en 1956, repose sur  une double innovation ; la transmission séquentielle des signaux de couleur et l’utilisation d’une mémoire de ligne. De cette double innovation, il tire son nom : le système est séquentiel couleur à mémoire, c’est le SECAM. Dans une première version, De France opte pour une modulation d’amplitude de la sous-porteuse de chrominance. Puis, il retient finalement la modulation de fréquence, qui, par son amplitude constante, rend moins visible sa présence dans l’image recomposée. D’améliorations en perfectionnement, d’ajustements en optimisations colorimétriques, le SECAM évolue et donne naissance à une famille, SECAM I, SECAM II, SECAM III et finalement SECAM IIIb, standard qui sera finalement adopté. Pendant cette période très créative, Henri de France à la chance de rencontrer plusieurs industriels qui s’intéressent aux nouveaux marchés de la télévision. Madame de France joue au bridge avec l’épouse de René Grandgeorge, directeur général de Saint-Gobain, qui voit dans la télévision des millions d’ampoules de verre à fabriquer. Maurice Ponte, le patron de la CSF, est son ami. Ils décident ensemble de réactiver la Compagnie française de télévision, la CFT, de la doter en capital et d’y abriter le laboratoire d’Henri de France. Sylvain Floirat rejoindra plus tard la CFT et en prendra la présidence. Pendant ces années de mises au point, la RTF s’associe à l’industrie pour montrer les premières réalisations du procédé SECAM. Dans la première semaine de mars 1958 ont lieu deux démonstrations couronnées de succès, l'une à Paris dans le laboratoire de recherches d'une grande firme de télévision, l'autre à l'hôpital Edouard Herriot à Lyon, lors d'une opération à coeur ouvert. D'autres démonstrations dans le domaine de l'enseignement de la médecine ont lieu ensuite dans de nombreuses villes françaises. C'est ainsi qu'à la faculté de médecine de Marseille, un équipement de télévision en couleur sur grand écran est installé à la fin de 1958. Des mires sont envoyées quatre jours par semaine, retransmis par un émetteur d’essais bande IV de la tour Eiffel. L'appareillage couleur est utilisé pour étudier les équipements, choisir le système de codage le plus approprié, former le premier noyau de spécialistes. En décembre 1959, le système SECAM est officiellement présenté à la communauté internationale par la France. Mais l’ambition d’Henri de France ne se limite pas au développement d’un procédé de transmission des signaux de la télévision en couleur. Il vise aussi le marché des récepteurs. Le composant essentiel du poste est le tube à masque américain. Il va s’efforcer de faire émerger une alternative au tube à masque : le tube à grille. L’idée consiste à substituer au masque perforé un réseau de fils parallèles tendus qui orienteront les électrons de chacune des couleurs vers des luminophores correspondants, disposés en fines bande verticales sur le fond de l’écran. C’est évidemment la perspective de fabriquer des millions de tubes à grille qui conduit Saint-Gobain à entrer au capital de la CFT. La France pose ainsi les bases d’un système complet de télévision en couleur, totalement indépendant des procédés américains.
En Angleterre, on reste fidèle à l’alliance atlantique. Les premières expérimentations de télévision en couleur en Europe d’après-guerre y sont réalisées. Le vieux standard 405 lignes noir et blanc a été conservé, et le parc de récepteurs est le premier d’Europe. La BBC entreprend alors d’adapter le système américain NTSC au 405 lignes. Au début des années 1950, le réseau existant diffuse régulièrement des émissions en couleur le soir, selon ce format NTSC 405 lignes, après la fin des programmes. Aucun récepteur n’est cependant mis sur le marché, dans l’attente des décisions gouvernementales. Un long débat s’amorce alors sur les différentes options possibles pour les futurs développements de  la télévision. Car simultanément, la bande UHF devient exploitable et la Grande -Bretagne doit décider si elle maintient pour cette bande le standard d’avant-guerre ou si elle adopte finalement le 625 lignes en usage partout en Europe, sauf évidemment en France. L’option consistant à conserver le standard existant, à l’adapter à la couleur et à l’utiliser également pour la bande UHF est attentivement évaluée. Elle présente beaucoup d’avantages. Le réseau existant, qui diffuse deux chaînes, la BBC et ITV, peut être facilement converti à la couleur. La compatibilité du NTSC assurera la continuité de réception des programmes  à tous les téléspectateurs équipés de récepteurs monochromes. Ces deux points sont essentiels  pour l’équilibre économique de la chaîne commerciale ITV qui naît en 1954. De plus, le standard 405 lignes utilise moins de bande passante que le  625, ce qui ouvre la perspective d’une meilleure utilisation de la nouvelle bande UHF. À l’époque, on estime que 6 à 7 réseaux nationaux pourraient être construits dans cette bande, contre 4 à 5 en 625 lignes. Bien sûr, le 405 lignes délivre des images moins fines que le 625, mais la différence de qualité perçue n’est pas telle, à la réception, dans des conditions réelles d’usage, que l’avantage puisse être considéré comme décisif. Pour trancher entre les différentes voies possibles d’introduction de la télévision en couleur au Royaume-Uni, et pour décider également d’autres questions relatives aux développements de la télévision , le gouvernement britannique installe un comité, le comité Pilkington, qui siégera de 1960 à 1962. Les conclusions du comité sont très claires. Il recommande l’adoption du standard européen continental à 625 lignes. Ce choix simplifiera la planification des fréquences, puisque les canaux de diffusion auront la même largeur partout, facilitera les échanges de programmes et permettra aux fabrications de  l’industrie britannique de pénétrer plus facilement les marchés européens. Le comité note aussi que la différence de qualité entre 405 lignes et 625 lignes, si elle n’est pas déterminante aujourd’hui, deviendra gênante lorsque les récepteurs à grande taille d’écran, 30 pouces précise le rapport du comité, seront mis sur le marché. La BBC devra créer, dans la bande UHF, une deuxième chaîne de télévision, ayant vocation à diffuser progressivement ses programmes en couleur. Deux autre réseaux UHF 625 lignes seront affectés à la transmission simultanée des programmes de BBC1 et de ITV en 625 lignes et en couleur. Le changement de norme s’opérera ainsi par une méthode de « duplication » des programmes, qui seront émis à la fois dans l’ancienne norme et dans la nouvelle, pour laisser le temps au consommateur de changer son poste récepteur. Ce changement est facilité par l’attrait d’une offre nouvelle : une chaîne de plus et la couleur. Les partisans du maintien du 405 lignes, présents en particulier chez ITV, ne désarmeront pas avant 1965, année de mise en œuvre effective des décisions du comité Pilkington. Mais ces décisions très fortes laisse ouverte la question du choix de procédé de diffusion couleur. Le NTSC est un standard flexible. Conçu pour le 525 lignes, il pouvait s’adapter au 405 lignes ; il pourra se greffer sur les 625 lignes de la nouvelle norme européenne. Les ingénieurs britanniques de la BBC s’étaient attelés à la tâche, avant la création du comité Pilkington, et ils vont désormais défendre le NTSC 625 lignes qu’ils ont mis au point dans la grande bataille qui s’annonce.
Ainsi, à la fin des années 1950, deux options s’offrent donc aux Européens : adopter le NTSC, ou attendre que le SECAM fasse ses preuves, pour éventuellement s’y rallier. Le CCIR reconnaît officiellement les deux procédés et au cours d’une de ses réunions, en 1958, les Russes se déclarent en faveur du NTSC. Louis Goussot, le représentant de la RTF, et chef de la délégation française demande alors la parole: "La France poursuit ses travaux et ses essais, et demande que la CCIR ne prenne aucune décision importante aujourd’hui". Il obtient gain de cause. Si le jeune ingénieur n’avait pas eu ce cran, toute l’Europe, à la suite de l’Angleterre, des Pays-Bas, des pays de l’Est  aurait adopté le système américain. Les expériences se poursuivent. Le premier émetteur français transmettant des images en couleur est mis en service au début de décembre 1961, à la tour Eiffel. Le procédé français est appliqué pour la première fois avec succès pour une transmission entre Paris et Londres, le 29 avril 1960. Les deux systèmes NTSC et SECAM sont présentés à la presse le 27 juin 1961 à Paris, et c'est le début de la course pour la détermination d'un système qui serait utilisé dans l'Europe entière. Des essais sont entrepris à cet effet dans les laboratoires des pays européens : Grande-Bretagne, Suisse, Italie, Allemagne Fédérale, Tchécoslovaquie. En  janvier 1963, la France, l'Angleterre, la Hollande, la Belgique, l'Italie, la Pologne, l'URSS se déclarent déterminées à porter leur choix, soit sur le système français, soit sur le système américain. Le SECAM joue désormais dans la cour des grands.
La France a gagné du temps pour perfectionner le SECAM et le tube à grille. Elle va aussi le mettre à profit pour clarifier ses choix quant à l’utilisation de la bande UHF.  Le CCIR a convoqué une conférence internationale pour répartir les fréquences cette bande entre les pays européens. La conférence doit se tenir à Stockholm en 1962. Elle est précédée de nombreuses réunions de travail, au cours desquelles, les français se trouveront de plus en plus isolés.Les responsables politiques et les ingénieurs sont  placés face à un dilemme. Doit-on conserver le 819 lignes en UHF, au risque de compliquer encore la planification des canaux (il faut 14 Mhz par émetteur pour un programme 819 lignes et seulement 7 à 8 Mhz pour un programmes 625 lignes) et d’indisposer tous nos voisins européens ? Ou bien doit-on renoncer à la « meilleure » télévision du monde, adopter le 625 lignes pour l’UHF et se préparer à une longue et coûteuse adaptation du réseau et du parc de récepteurs ? Les esprits mûrissent lentement. En 1958, le mot d’ordre est clairement de conserver le 819 lignes, de l’adapter à la couleur et de l’utiliser en UHF. La RTF obéit et effectue des essais en couleur 819 lignes, avec une sous porteuse à 7,25 Mhz. Les autres pays européens font pression sur la France pour qu’elle se range à l’avis génreral. Compte tenu de sa position centrale en Europe de l’Ouest, un découpage de la bande UHF particulier à la France, obérerait toute la planification de cette bande sur le continent. On esquisse  alors des compromis bâtards. Dans les premières discussions, on tente de couper la poire en deux : pourquoi pas 700 lignes avec un canal de 10 Mhz ? cela n’a évidemment pas beaucoup de sens. Puis d’autres solutions acrobatiques sont imaginées: garder le 819 lignes pour le noir et Blanc et adopter le 625 pour la couleur. L !industrie pousse à la construction d’un deuxième réseau en 819 lignes  et Noir et blanc ; Elle pense ainsi continuer à bénéficier des protections du standard hexagonal. Les Français, qui se sont longtemps arc-boutés sur l’argument de la qualité de l’image doivent se rendre à l’évidence L’argument de la qualité s’effondre. En conditions normales de réception, il n’y a pas d’écart perceptible par le commun des mortels entre le 819 et le 625. En 1958, à Moscou, la délégation française en est réduite à n’utiliser que l’argument d’autorité ; elle a reçu des consignes formelles. Mais la France doit bientôt rendre les armes ; En 1961, le gouvernement français va au bout de la logique technique ; la bande UHF sera planifiée en 625 lignes, pour le noir et blanc comme pour la couleur. L’arrêté du 3 juin 1961, signé par M. Paul Terrenoire, Ministre de l’information officialise la décision, sans autre forme de procès. La décision surprend, car elle n’est pas le résultat d’un long processus de concertation transparent, comme le comité Plikington l’a conduit au Royaume-Uni. Pourtant elle est très cohérente, et elle aboutit finalement aux mêmes orientations. Le 819 lignes réduirait les capacités de la bande UHF en nombre de programmes, ce qui la défavoriserait par rapport aux voisins. L’isolement technique français commence à créer des complications coûteuses de conversion de standards, alors que les échanges de programmes s’accélèrent. Enfin, si la France peut espérer entraîner une partie du Monde dans le choix du SECAM, elle ne peut évidemment pas le convertir au 819 lignes. Elle doit donc elle-même mettre en œuvre la couleur en 625 lignes. Et comme le maintien de deux standards serait très pénalisant, elle doit se préparer, sans encore vraiment l’annoncer, à abandonner à terme le 819 lignes. C’est le prix à payer pour pouvoir rallier le plus de pays  à son procédé SECAM, le meilleur du monde évidemment. Le plan de Stockholm accorde à La France les fréquences suffisantes pour construire trois réseaux nationaux de télévisions. La route est toute tracée ; il y aura une deuxième chaîne, lancée en noir et blanc 625 lignes et passant ensuite progressivement à la couleur, puis, plus tard, une troisième chaîne. Le troisième réseau UHF est mis en réserve, pour accueillir, le moment venu la première chaîne, en version couleur.
Pendant que la France signe l’arrêt de mort de ce 819 lignes qu’elle a tant adoré, l ‘Allemagne travaille. En 1959, un ingénieur de la compagnie Telefunken, Walter Bruch, est chargé de diriger une équipe dont la mission est d’évaluer  les différents procédés de télévision en couleur. Le laboratoire est géré de manière assez autonome et Bruch dispose d’une grande liberté d’action. On retrouve dans le personnage certains des traits  de Barthélemy et certains de ceux d’Henri de France. Né en 1909, il se passionne très jeune pour la télévision et réalise dés 1929 des expériences de réception de la télévision mécanique diffusée par l’émetteur de Berlin. C’est aussi un ingénieur diplômé en génie électrique et mécanique, curieux, inventif et pragmatique. Cameraman de télévision lors des Jeux Olympiques de Berlin en 1936, il participe aux démonstrations de télévision organisées pendant la foire internationale de Paris en 1937. Pendant la guerre, il réalise un circuit fermé de télévision servant à contrôler les lancements de fusées V2 à la base de Pennemünde, et travaille sur le radar, notamment sur l’utilisation de la ligne à retard en verre dont Telefunken a déposé le brevet en 1940. En 1946, on le retrouve à Berlin dans un laboratoire sous contrôle soviétique puis il rejoint la compagnie Telefunken. En 1951, il part en mission aux Etats-Unis. Il en revient très déçu par les médiocres performances du NTSC. À son retour, il est convaincu  que l’on ne  peut pas imposer cela aux Allemands, tellement attachés à la haute qualité technologique. Lorsqu’il prend la tête du laboratoire d’évaluation, le SECAM sort des limbes. Certains experts y voient clairement une tentative française d’échapper à la domination américaine et tournent l’acronyme en dérision : le SECAM devient pour eux un « Severe Effort Contra American Method ». Pour Bruch, le SECAM n’est encore qu’une curiosité de laboratoires. Car les Français continuent de vouloir appliquer le procédé aux 819 lignes, standard voué selon lui à disparaître et il considère que l’industrie française  est incapable de produire en grande quantité des lignes à retard bon marché. Il invite cependant les techniciens français à venir présenter le SECAM à Munich au début des années 1960 et en conclut à la supériorité potentielle du système français sur le NTSC. Il en rend compte à ses autorités, mais il ne leur dit pas vraiment qu’il se met alors à travailler à l’amélioration du SECAM. C’est lors d’une ennuyeuse soirée à l’opéra, avec son épouse, qu’il a l’inspiration fondatrice. Il imagine de combiner la sous-porteuse du NTSC avec la ligne à retard, utilisée astucieusement pour qu’elle gomme les défauts de couleur provoqués par la transmission. Pour cela, il suffit d’une ligne sur l’autre de changer certains paramètres de modulation de la sous-porteuse pour faire de la ligne suivante un « miroir » de la ligne précédente. Les erreurs de transmission seront approximativement égales et de signes contraires, et en additionnant point à point les deux signaux grâce à la ligne à retard, on les compensera pour restituer le signal original.  Bruch entraîne son équipe dans la mise au point d’un premier prototype, refait faire un montage en toute hâte pendant les vacances de noël, prend un premier brevet en juillet 1961, puis le brevet définitif en décembre 1962. Aux yeux de la communauté technique européenne, c’est un franc-tireur, qui n’est pas soutenu par sa firme. Telefunken ne vient-elle pas de signer un accord avec la CFT de représentation exclusive du SECAM en Allemagne, renouant ainsi avec les anciennes collaborations d’avant-guerre ? Il n’est pas vraiment pris au sérieux, et jouant de cette situation d’outsider peu crédible, il obtient de présenter le résultat de ses recherches au comité ad hoc de l’UER sur la télévision en couleur, qui vient de commencer ses travaux. Habilement il dévoile à la fois son propre procédé et un SECAM amélioré. Quelques jours avant la présentation qui doit avoir lieu en janvier 1963, il se rend compte qu’il lui faut trouver un nom au procédé. Le baptiser « sytème Brüch » serait une erreur, non pas parce que cela traduirait une certaine immodestie, mais parce que ce n’est pas très vendeur et c’est difficilement traduisible. Il opte pour PAL, « Phase alternative lines ». Cela  sonne bien, dans beaucoup de langues et c’est suffisamment descriptif des modalités techniques utilisées. Derrière cette marque, il va bien tôt parcourir le monde, en commis voyageur de l’Allemagne Fédérale rassemblée, toutes forces confondues, industriels, organismes de télévision, pouvoirs publics, en démontrant aux ingénieurs, ses collègues, les forces et les faiblesses des trois systèmes, et en trouvant à chaque fois les bons arguments pour convaincre que le bon choix, c’est le PAL ! Aux adversaires qui moque son procédé en proclamant, le PAL, c’est « pay for additionnal Luxury » , il répond fièrement « Perfection at last » !
En 1963, les pièces sont posées sur l’échiquier. La partie va pouvoir commencer. Elle va se jouer principalement au cours de deux réunions du CCIR, organisées à Vienne en 1965, et en Oslo en 1966, mais également au sein d’un groupe de travail « ad hoc » créé en 1962 par l’Union européenne de radiodiffusion (UER). Dans ce groupe de travail, les points de vue et les analyses des experts des organismes de télévision pourront librement se confronter, sans que viennent interférer, du moins les participants l’espèrent-ils, les prises de positions politiques et les parasitages du jeu diplomatique. Hélas, le problème posé aux ingénieurs, choisir le meilleur procédé, n’a pas de solution. Des milliers de pages de rapport seront écrites pour comparer les trois standards, soupeser les avantages et les inconvénients de chacun, exposer les résultats des tests les plus précis. Rien n’y fait. Le NTSC, pourtant toujours soutenu par les Anglais, est certes dépassé par les deux autres candidats, mais le PAL et le SECAM ne peuvent être départagés. Soumis à une batterie de critères de qualité et de performances, c’est tantôt l’un, tantôt l’autre qui sort vainqueur. Las artefacts qu’ils produisent dans les conditions les plus délicates de transmission ne sont pas équivalents : le SECAM « prend feu » et d’innombrables petites flammes rouges horizontales, qualifié aussi de poissons rouges, envahit l’écran ; le PAL est affecté d’un effet de persiennes, baptisé de « barres de Hanovre ». En réalité, il n’y a pas une réponse, mais plusieurs, selon la population à laquelle la question est adressée. Les ingénieurs spécialistes de la diffusion et de la transmission donnent plutôt l’avantage au SECAM, qui assure, grâce à la modulation de fréquence, une meilleure fidélité et une plus grande stabilité des couleurs, même si cela se paie par des effets perturbateurs de l’image, comme l’irisation des vêtements du genre « prince-de-galles ». Les ingénieurs en charge de la production, de la construction et de l’exploitation des studios, préfèrent en général le PAL, car les opérations de traitement et de mélange des signaux sont facilitées par la modulation d’amplitude de la sous porteuse. Or, dans les organismes de radiotélévision, ce sont souvent ceux-là, parce qu’ils sont  en contact direct avec les journalistes et les réalisateurs, qui ont le dernier mot. C’est en ciblant cette population que les vendeurs du PAL construiront leurs succès commerciaux. En cette année 1963, Les experts européens ne peuvent pas trancher. Peut-être auraient-ils pu parvenir, s’ils avaient eu le sentiment qu’ils en avaient clairement le mandat, à améliorer les procédés et à en effectuer la synthèse, en l’état de l’art des techniques, susceptible de devenir la norme unique de télévision en couleur européenne ? Ils n’oseront pas. Et, par une ironie dont l’histoire a le  secret, on verra que ce sont les Russes qui tenteront de forger l’ultime compromis.
En 1964, les conditions semblent cependant réunies, au plan politique, pour que puisse s’opérer un rapprochement franco-allemand sur le dossier de la télévision en couleur. Le traité d’amitié entre les deux pays a été signé, et les autorités allemandes sont favorables à un accord politique.  Alain Peyrefitte, alors Ministre de l’Information du général de Gaulle exprime lui aussi sa préférence dans un document de juin : «  …aucune nation européenne ne pourra s’aventurer sans risque à faire cavalier seul et à adopter un procédé qui ne serait pas celui retenu par les autres nations… L’exemple de la France, qui joua en Europe le rôle de franc-tireur, avec son 819 lignes,  définition quelle a du abandonner pour la deuxième chaîne, est révélateur en la matière. L’effort principal doit porter sur les Allemands, dont le ralliement au procédé français serait un atout maître dans les négociations à venir. »
Il faut viser un procédé unique, sans doute, mais obtenir un ralliement des Allemands au SECAM est un objectif bien présomptueux. En octobre, Alain Peyrefitte et son homologue allemand, Karl Günther von Haze se rencontrent, sur une vedette spécialement affrétée, qui descend le Rhin de Bingen à Bonn. Le Ministre français propose une coopération industrielle, en échange de l’adoption du SECAM par la RFA. La réponse de son interlocuteur est cinglante ; non seulement le gouvernement allemand ne se mêle pas de la marche des affaires privées, mais il est persuadé que l’industrie allemande va conquérir la totalité du marché avec son procédé, et ne voit donc pas pourquoi elle devrait se contenter de la moitié, dans le cas ou elle devrait partager avec les compagnies françaises. Cette intransigeance n’est-elle que tactique ? Ou bien révèle plus profondément le sentiment d’une réelle supériorité économique ? On ne le saura sans doute jamais, car les discussions s’interrompent avant d’avoir vraiment commencé. L’Allemagne rejette la proposition de la France ? Et bien, elle ira la faire à L’Union soviétique.  La configuration géopolitique est idéale. De gaulle, notamment pour se dégager quelque peu de l’emprise américaine, sans renoncer à ses alliances fondamentales, veut nouer des relations moins conflictuelles avec les  Russes ; sa politique repose sur un triptyque : détente, entente, coopération. La Vème république est également lancée dans un programme de grandes réalisations techniques, notamment dans les domaines du nucléaire, de l’aéronautique - le Concorde- et de l’espace - la fusée Diamant. Il s’agit de porter la France aux premiers rangs des grandes nations scientifiques. La télévision en couleur arrive à point nommé. Le SECAM figure dans liste des prouesses techniques françaises célébrées par le Général, et la télévision en couleur peut être un objet de coopération avec les soviétiques, qui ne touche pas directement aux domaines les plus sensibles dans ce climat de guerre froide, mais qui peut cependant avoir un grand retentissement. L’objectif du procédé unique n’est pas perdu de vue. Simplement la logique de manœuvre change. L’Allemagne, prise en tenaille entre la Russie, les pays de l’Est qui ne manqueront pas de la suivre et la France, sera contrainte de s’incliner. Le reste de l’Europe suivra, à l’exception peut-être de l’Angleterre, fidèle à ses liens transatlantiques et qui adoptera sans doute le NTSC. Les russes, dès l’origine, avaient exprimé leur préférence pour le NTSC ; Kroutchev, en visite à Paris en 1961, avait été approché sur ce sujet de la télévision en couleur, mais il n’en avait résulté aucune suite. Pour convaincre les Russes, la diplomatie française va alors déployer tout son talent. Alain Peyrefitte se rend à Moscou en janvier 1965. La visite a été précédée de présentations techniques du SECAM, par les équipes de la radiotélévision française, devenu l’ORTF en 1964. Il ne règne pas dans ces  équipes un climat de soutien indéfectible au procédé français. Un jeune ingénieur talentueux, Maurice Rémy, polytechnicien de la promotion 1952, est en particulier assez réservé. Il rêve à l’unification des normes en Europe, mais il est discipliné. Il obéira, jusqu’au bout. Le temps presse, car la conférence de Vienne est convoquée pour le 25 mars. La négociation est confiée côté français à un délégué interministériel, François de la Boulaye, diplomate qui fut en poste à Moscou. Le KNIR, comité d’Etat pour la coordination de la Recherche scientifique et technique sera l’interlocuteur côté soviétique. Des rencontres préliminaires avaient été organisées entre ce comité et les responsables français, dans le courant de 1964, afin d’explorer la possibilité d’accroître les échanges commerciaux entre les deux pays. Les rencontres à tous les niveaux vont s’intensifier pendant ce premier trimestre 1965. Les ingénieurs soviétiques ne sont pas à priori favorables au procédé français. Ils continuent à privilégier l’adoption du NTSC. La diplomatie française met alors en oeuvre toute son expérience et son habileté pour préparer un accord intergouvernemental de soutien au SECAM, avant l’échéance impérative, et elle y parviendra. Certains commentateurs  y verront plus tard, au contraire, une victoire de la diplomatie russe, qui a su tirer profit de la double sollicitation à laquelle elle était soumise. Début mars, L’ambassadeur de Grande-Bretagne avait en effet proposé au président du KNIR de mettre à sa disposition les résultats de travaux anglais sur le NTSC, pourvu que la Russie accordât son vote à ce procédé lors de la conférence de Vienne. Cette offre était restée sans suite, mais pouvait constituer une solution de rechange au cas où la négociation avec les Français n’aboutirait pas. Or, les Français, privés du recours d’une coopération avec les Allemands,  n’avaient pas d’autre issue que la conclusion d’un accord avec Moscou. L’accord du 22 mars, signé entre M. Vinogradov, ambassadeur de l’Unions soviétique à Paris et le Ministre Alain Peyrefitte comporte il est vrai beaucoup de points favorables aux Soviétiques. Aucune redevance ne sera versée par les Russes pour l’exploitation des brevets SECAM. L’Union Soviétique soutiendra le SECAM à Vienne et s’efforcera d’obtenir le soutien au SECAM par les pays de l’Est. Un plus large accord de coopération scientifique et technique est envisagé entre les deux pays. Mais le point le plus important est sans doute le volet industriel de l’accord. La France s’engage à transférer la technologie du tube à grille et d’assister les Russes dans la construction des usines devant les produire. C’est très précieux pour les Russes, qui y voient la possibilité de développer une télévision en couleur totalement indépendante des Américains, mais c’est aussi très audacieux pour les Français, car la CFT ne maîtrise pas  la fabrication en série du tube à grille !
L’accord, immédiatement rendu public, la veille du premier jour de la conférence de Vienne, fait l’effet d’une bombe en Europe. D’une part, la France est violemment critiquée pour pratiquer une politique de « fait accompli »,  qui met ses partenaires occidentaux au pied du mur. D’autre part, le coup diplomatique est salué comme une brillante réussite, qui peut éventuellement conduire au succès final, c’est-à-dire à l’adoption du SECAM comme standard unique de télévision en couleur en Europe.
Un caricaturiste allemand, montre De gaulle, chevauchant la Tour Eiffel, et faisant triompher la « Gaullovision » de l’Atlantique à l’Oural.
Mais de quel SECAM s’agit-il ? L’accord du 22 mars porte sur un système commun « basé sur le procédé SECAM et son standard ». Jusqu’à la dernière minute, les diplomates français ont bataillé pour obtenir la mention du terme « standard », au lieu de celui de « caractéristiques » qui avait la préférence des Russes. Ces arguties sémantiques étaient révélatrices de l’état d’esprit des Russes. Pour la partie soviétique, le SECAM était un point de départ, susceptible de développements futurs et ils entendaient bien conserver la liberté de faire évoluer le procédé. C’est d’ailleurs ce que disait la lettre de l’accord : « un système commun sur la base du SECAM… »
La conférence de Vienne ne débute donc pas sous les meilleurs auspices. La délégation française est conduite par des diplomates et cette volonté de la France de situer d’emblée le débat à un niveau politique indispose une communauté d’experts, davantage habitués à pratiquer des joutes techniques, selon un rituel bien huilé. Leurs batailles obéissent à des codes qui ne sont pas  ceux des ambassades, car ils reconnaissent ensemble, en dernier recours,  un seul juge : la « vérité » de la science. Le « coup » français produit finalement un effet assez prévisible : le rapprochement de partisans du NTSC, britanniques et néerlandais, de ceux du PAL, allemands, italiens, suisses, européens du Nord notamment. Ils décident de se rassembler sous une seule bannière pour livrer la bataille. La marque ombrelle « QUAM », abrégé technique désignant le procédé de modulation de la sous porteuse commun au NTSC et au PAL, sera leur étendard. Le SECAM obtient 23 suffrages, dont 16 provenant de pays européens. Le « QUAM » est soutenu par 18 participants. C’est une majorité pour le SECAM certes, mais ce n’est pas une  victoire. Le CCIR est une instance consultative. Pour l’emporter, il aurait fallu entraîner dans son camp au moins l’Allemagne, l’Italie et les Pays-bas et isoler les défenseurs du NTSC. Mais rien n’a été fait pour cela, car le temps et la volonté manquaient. La formule est prêtée à Bismarck : « Quand on est trois, il faut être l’un des deux ». Le SECAM n’était pas l’un des deux. Pour préparer la réunion de Vienne, La délégation britannique avait reçu de ses autorités des consignes claires : soutenir le NTSC, s’opposer au PAL, s’opposer fermement au SECAM. La suite de la partie est inscrite dans ce mandat. Une deuxième conférence est convoquée à Oslo, pour l’été 1966. Cela laisse du champ pour les manœuvres.
En mai 1965, les Allemands sont invités à Londres, pour présenter les derniers développements du PAL et discuter de la situation après la conférence. Progressivement, les Britanniques comprennent que leur choix de soutenir le NTSC les conduit dans une impasse. Mais la BBC résiste. L’un de ses brillants ingénieurs, Francis Mac Lean, s’opposera jusqu’au bout au ralliement au camp du PAL. Il refuse de reconnaître les insuffisances du NTSC et met en avant la simplicité plus grande du procédé et sa capacité à faciliter  les échanges de programmes avec les pays anglo-saxons. Le « Foreign office » ne voit que des avantages politiques à explorer la piste d’une collaboration avec la RFA, et l’industrie britannique, conformément à ses intérêts de marché, pousse aussi à l’abandon du NTSC. Mais le « Television Advisory Committe » n’arrive pas à convaincre la BBC, dont l’indépendance est clairement respectée par l’administration. Après des mois de discussions improductives, le gouvernement finit pourtant par passer outre les réserves de la BBC et fait discrètement savoir aux autorités allemandes, en novembre, qu’il s’apprête à faire une déclaration publique en faveur du PAL.
Et pendant que le camp du PAL se renforce, les Russes et les Français s’organisent pour mettre en oeuvre l’accord du 22 mars. Une  commission mixte en est chargée. Sa première réunion a lieu à Moscou en mai 1965. La délégation qui s’envole vers la capitale soviétique ne se doute pas qu’une surprise les y attend. En marge des discussions, les ingénieurs français sont invités à la présentation d’une nouvelle invention, imaginée par deux scientifiques russes, les époux Tessler. Ils assistent alors à la démonstration d’un nouveau procédé de télévision en couleur, le système NIR. Les Soviétiques considèrent qu’il s’agit d’une simple évolution technique, qu’ils ont tout loisir de développer, conformément à la lettre de l’accord. Le NIR utilise une ligne à retard, comme le SECAM, mais la sous-porteuse de couleur est modulée en amplitude, comme dans le PAL et le NTSC. La technologie en est encore au stade du laboratoire, et de longs mois de travail seront sans doute nécessaires pour la transformer un produits industriels. Pour preuve de leur bonne volonté, les responsables Russes proposent de nommer ce procédé, le SECAM IV. Cet événement plonge la diplomatie française dans un profond trouble. Un nouveau paramètre vient s’ajouter dans le jeu subtil et mouvant qui doit conduire, selon la volonté du général, à la victoire du SECAM. D’ailleurs, ce procédé NIR, est-ce vraiment du SECAM ? S’engage alors une série de réflexions byzantines sur la vraie nature du NIR ; est-ce du SECAM ou du PAL déguisé en SECAM sous des oripeaux soviétiques ? Les ingénieurs de l’ORTF n’ont pas de doute. Ils ont vite vu que le NIR est plus proche du PAL que du SECAM. Mais ce ne sont pas des maladroits, ni des innocents. Ils poursuivent toujours le même but : éviter l’isolement de la France. Le NIR est un cadeau du ciel. En soutenant le NIR, ils ont peut-être une chance de convaincre leurs collègues allemands de choisir finalement une solution commune. C’est ce qu’ils font lors d’une réunion du comité de l’UER, qui décide d’admettre le NIR comme candidat supplémentaire à la normalisation. Et ils se mettent à travailler avec entrain à l’amélioration du procédé NIR, grâce notamment aux excellentes idées de Maurice Rémy. Mais ils connaissent aussi le pouvoir des symboles. Contre toute logique technique, ils produisent moult rapports et notes d’analyses démontrant la plus grande proximité du NIR avec le SECAM qu’avec le PAL. Et évidemment ils donnent leur onction, pour que le NIR prenne le nom de SECAM IV. Dans les cabinets ministériels, certains sont ébranlés. Quelques-uns, qui regrettent au fond d’eux-mêmes que la France n’ait pas davantage recherché une coopération avec les Allemands, se demandent si le moment n’est pas venu de tenter un rapprochement. D’autres craignent qu’un refus de reconnaître le NIR comme un enfant du SECAM n’aboutisse à la rupture de l’accord avec les Russes. D’autres encore, méfiants, ne se content pas des affirmations des ingénieurs et sont convaincus que le NIR n’est qu’un faux-nez du PAL, qui finira par l’emporter si l’on ne tient pas ferme la ligne de défense du SECAM pur et dur. La nouvelle de la naissance du NIR est rapidement arrivée jusqu’à Londres, et elle ravit Mac Lean. La France organise en Angleterre  pendant plusieurs semaines, au milieu de 1965, des campagnes publicitaires en faveur du SECAM. Plusieurs journaux et magazines ont fait paraître un dessin humoristique où l’on voit un téléspectateur au bord de la crise de nerfs, s’échinant à régler la couleur de son téléviseur au moyen des deux fameux boutons du NTSC. C’est justement le moment ou les autorités britanniques s’efforcent de convaincre la BBC d’abandonner son soutien au procédé américain. La campagne manque donc doublement sa cible : ce n’est pas l’opinion publique qu’il faut gagner et ce n’est pas le NTSC qu’il faut combattre, puisqu’il disparaît lentement de la scène britannique. Mac Lean va sauter sur l’occasion pour reprendre son rôle d’agitateur professionnel de la communauté des techniciens européens de la télévision, et de meilleur adversaire de la France. Il prend contact avec l’ambassade de l’Union soviétique à Londres, pour obtenir des informations plus précises sur le système et organise un voyage à Moscou, ou il rencontre des experts soviétiques peu convaincus de la supériorité du SECAM « original » ( on prétend que les ingénieurs des pays de l’Est « n’aiment pas » la modulation de fréquence »), mais conscients que le choix final, politique,ne leur appartient pas. Mac Lean comprend que le NIR est comme la chauve-souris de la fable : «  je suis oiseau voyez mes ailes….je suis souris, vivent les rats ! ». Voyez ma modulation, je suis du PAL, voyez ma ligne à retard, vive le SECAM ! Son esprit britannique, flexible, calculateur et manoeuvrant saura sûrement en tirer parti dans la confrontation future, et qui sait, Mac Lean deviendra peut-être le héros de l’unification des normes en Europe. Cet activisme irrite les ministères britanniques des affaires étrangères et des postes, ce dernier étant le représentant de la Grande-Bretagne au CCIR, qui s’inquiètent des dégâts que pourrait causer l’incontrôlable ingénieur. À la fin de 1965, De Gaulle met fin aux hésitations des diplomates ; pas question de se laisser manœuvrer par les Allemands. Il faut tenir bon et appliquer l’accord tel qu’il a été conçu. Ce sera le SECAM, rien que le SECAM. Lors de sa réunion de janvier 1966, la commission mixte admet donc l’existence du NIR, pour ne pas froisser les Russes, mais on lui donne le nom de SECAM IV, pour sauver les apparences. Enfin, en avril, après des démarches politiques répétées, les Russes et les Français tombent d’accord pour défendre officiellement le SECAM « original », dit SECAM IIIb, à la conférence d’Oslo. Mais il existe un codicille confidentiel : s’il apparaît possible de faire du  SECAMIV la norme unique en Europe, la France et la Russie soutiendront alors ce standard.
Le dernier acte de la tragédie s’ouvre à Oslo, le 22 juin 1962. Jamais une réunion du CCIR n’a rassemblé autant de participants et n’a eu un tel retentissement dans les médias. Pour préparer les discussions, chaque délégation a répondu à un questionnaire, par lequel elle devait exprimer sa préférence entre les différents systèmes proposés. La plupart des pays d’Europe de l’Ouest se sont rangés dans le camp du PAL ; Le camp du SECAM repose toujours sur l’axe Paris, Moscou, Pays de l’Est ; quelques pays, dont la Belgique, le Luxembourg, le Portugal et la Tunisie optent pour le NIR/SECAM IV. Le NIR fait ainsi une modeste entrée sur la grande scène. Une entrée bien plus spectaculaire avait pourtant été manigancée par les ingénieurs français et russes. Cet épisode est l’un des plus rocambolesque de la grande guerre des standards, et il est révélateur des tensions qui existent au sein de la délégation française. Discrètement, Les équipes techniques de l’ORTF avaient fabriqué un camion de démonstration, équipé de matériels prototypes aux normes NIR/SECAM IV, dans les laboratoires d’études d’Issy les Moulineaux. Prêt en temps et en heure, le véhicule devait prendre la route de la Norvège, pour montrer au Monde rassemblé, la qualité évidente du nouveau procédé, avec le secret espoir que l’impression serait si forte quelle ferait pencher la balance en faveur du  SECAM IV. Le camion ne quitta jamais son garage. Dans son édition du 31 juillet 1966, le « Canard enchaîné" ironise : « SECAM (IV) ne t’ouvre pas ; ou comment on avait planqué l’autocar ». Le journal impute aux intérêts privés, de la CFT et des industriels soucieux de défendre leurs brevets, la responsabilité du blocage. Les ingénieurs français y voient plutôt la main d’Alain Peyreffite, devenu en janvier Ministre de , mais toujours en charge du dossier de la télévision en couleur. Olivier Chantriaux conteste l’affirmation que le ministre est lui-même intervenu pour annuler l’envoi du camion. Pourtant, il a bien fallu que quelqu’un empêche son départ. La décision était d’ailleurs parfaitement cohérente : le repli sur le SECAM IV n’était envisagé que comme recours, et ne pouvait être opéré que si l’Europe entière était prête à s’y rallier. La France ne pouvait pas à la fois, ordonner à ses diplomates de soutenir le SECAM IIIb, dans les séances officielles de la conférence, et laisser ses ingénieurs vanter les mérites du SECAM IV, en exhibant leur camion-laboratoire, comme un ostensoir. Le climat à Oslo, est donc particulièrement lourd. Le CCIR est une instance internationale technique, ce n’est pas une enceinte diplomatique et les responsables de la conduite des débats se montreront en permanence mal à l’aise, pour présider des séances placées d’emblée par la délégation française sur le registre de la négociation politique.
Pour faciliter les discussions, un sous-groupe de travail, composé des délégations de la France, de l’Allemagne, de la Grande-Bretagne, de la Yougoslavie, de la Tchécoslovaquie de l’Italie et de l’Union soviétique est formé et tient sa première réunion le 7 juillet. Dans un style théâtral et dramatique, qui stupéfie ses interlocuteurs, les représentants français abattent alors sans attendre leur principale carte. La France soutiendra le SECAM IV, si toute l’Europe accepte de s’y rallier. Les participants anglais et allemands sont interloqués. Et à partir de ce moment crucial, les récits divergent. Voici la Version d’Andreas Fickers : les représentants du camp PAL n’ont évidemment pas de mandat pour discuter de tels enjeux politiques, et demandent à consulter leurs autorités. Or, l’Allemagne et l’Angleterre ont d’ores et déjà fixé des dates pour le lancement effectif de services de télévision en couleur réguliers sur leur territoire. Ce doit être avant la fin de 1967. Le NIR/SECAM IV n’est à l’évidence pas encore industrialisé et l’adopter  revendrait à décaler cette date, ce qui ne peut être envisagé. Les anglo-saxons, s’abritent également derrière la liberté de décision de leurs industries. Bref la proposition française arrive trop tard et elle n’est pas assez construite. Ceci qui ne fait qu’exaspérer les français, qui retirent leur offre et annoncent leur choix définitif du SECAM IIIb. La version officielle française est différente. Un télégramme diplomatique du 20 juillet la transcrit fidèlement : « … La Grande-Bretagne et l’Allemagne écartent tout compromis fondé sur l’adoption du SECAM IV comme procédé unique de télévision en couleur pour l’Europe et s’en tiennent au choix du système PAL. ». Michel Dubail, directeur général de la CFT et  important témoin de tous ces évènements avancera même l’hypothèse que ce sont les Allemands et les Britanniques qui ont demandé à la France de ne pas envoyer le camion  ! Il s’agit bien sur de leur faire porter la responsabilité de l’échec et de convaincre que l’intransigeance était dans le camp du PAL, qui s’étant concerté, avait a priori pris la décision de ne pas donner suite à d’éventuelles offres de compromis.
La conférence ne peut que constater la partition cathodique de l’Europe. La France ramène à elle les brebis égarées vers les rivages du NIR et, selon l’expression imagée d ‘Olivier Chantriaux, un rideau de verre sépare le continent. Deux compétitions vont maintenant s’engager : qui sera le premier à démarrer ? qui va conquérir le reste du Monde ?
 Il ne faudra pas attendre longtemps pour connaître le résultat de la première. Le réseau BBC2 commence ses émissions en couleur le 1er juillet 1967. C’est au salon international de la radio et de la  télévision de Berlin quel le 25 août 1967, la télévision allemande commence ses émissions en PAL. Et c’est le 1er octobre 1967 que la deuxième chaîne de l’ORTF est convertie au SECAM. L’émission de lancement, ou l’on voit quatre importants personnages se congratuler réciproquement et célébrer cette magnifique réussite, est presque devenue une vidéo culte sur Internet. Quand on fait « monter » la chrominance, la couleur apparaît, que seuls quelques privilégiés peuvent admirer. Georges Gorse, ministre de l’information, lance alors tristement « Et maintenant, vous nous voyez tels que nous sommes ! » ; Claude Mercier, le patron des ingénieurs, félicite toutes ses équipes pour l’immense travail accompli, avec acharnement et professionnalisme, pour rendre possible cette grande transformation. Mais tous ont l’air si sérieux, presque tristes…
La conquête de la Planète prendra beaucoup d’années ; La France exporte le SECAM dans ses zones d’influences traditionnelles : l’Afrique francophone, une partie du Moyen Orient et certains pays arabes. L’Union Soviétique tient ses engagements et l’ensemble des pays satellites passent au SECAM, parfois dans la douleur, comme dans le cas de l’Allemagne de l’Est.
L’Italie sera pendant quelques mois le lieu d’un véritable affrontement, au début des années 1970. Une rumeur rapportera que Les Français y emploient des méthodes peu convenables : promesses d’admettre FIAT au capital de Citroën, rétrocession à un partenaire italien à désigner d’une partie des redevances perçues sur les brevets, création d’une union télévisuelle des pays méditerranéens dont le siège serait fixé à Rome, don de 500 millions de lires pour les partis politiques italiens. Un temps, les Italiens envisagent un double standard : un réseau en PAL et un réseau en SECAM ! Ils finiront par adopter le PAL, en 1975. La France est plus heureuse en Arabie saoudite, qui confie au gouvernement français et aux entreprises françaises, un énorme contrat de construction d’un réseau complet de télévision, comprenant un grand centre de production à Riad. Cela représentera plusieurs années de travail pour les ingénieurs français, expatriés, qui reviendront les bras chargés de tapis d’orient.
Pour le reste, le PAL l’emporte haut la main. Les industries allemandes vendent le PAL à leurs clients et savent s’y prendre. Ils arrivent même à prendre pied en Amérique du Sud, continent historiquement lié aux Etats-Unis et aux normes américaines. Plus tard, ils vendront des studios PAL à des pays ayant fait le choix du SECAM. Pour préserver la norme de diffusion, la France ira même jusqu’à fournir gracieusement de transcodeurs pour convertir les signaux avant de les envoyer sur le réseau de diffusion. Car le transcodage est devenue une activité routinière, et les fabricants savent fabriquer des récepteurs multistandards, dont le surcoût finit par devenir modeste. Les différences pratiques entre le PAL et le SECAM s’estompent. Elles n’ont d’ailleurs jamais été vraiment radicales, et l’on se souvient que le PAL utilisait des brevets d’Henri de France. Cependant, l’enjeu industriel ne se situait pas principalement à ce niveau des équipements professionnels. Tout  fabricant de caméras, de mélangeurs, de télécinémas, tout installateur de studios, compétitif dans une norme pouvait aussi l’être dans l’autre.  Non l’enjeu réel, c’était le marché des récepteurs. C’est le tube à grille qui avait alléché les Russes, pas la modulation de la sous porteuse. Malheureusement, l’industrie française ne parviendra jamais à mettre au point le tube à grille. Malgré l’injection d’importants crédits publics, une succession de réorganisations industrielles, marquée notamment par l’arrivée de Sylvain Floirat à la présidence de la CFT an 1966, la France dut se résoudre à abandonner cette filière en 1971. Thomson, associé à RCA, finira par créer la société Vidéocolor, qui fabriquera pendant de nombreuses années en France des tubes à masques. Le brevet du tube à grille avait été racheté en 1968 par la firme japonaise SONY, qui réussira à le développer et à commercialiser des téléviseurs utilisant cette technologie, sous la marque Trinitron. Cet événement marque sans doute le début du mouvement de déplacement vers l’Asie, du centre de gravité de l’industrie électronique mondiale.
Finalement le bilan global de la politique de promotion du SECAM n’apparaît pas à la hauteur des efforts de tous ordres qui ont été consentis, principalement par l’Etat, pour faire prévaloir la technologie française. Certes, la CFT a perçu des montants significatifs de l’exploitation des brevets qu’elle détenait, à hauteur de quelques dixièmes de % du prix de chaque téléviseur vendu. Mais la « supériorité » proclamée du SECAM n’était pas suffisante, à supposer qu’elle ait réellement existé, pour assurer un avantage décisif aux industriels français sur les marchés européens et mondiaux.
Georges Pompidou, avec son esprit acéré et sa verve a magistralement compris les ressorts de la partie. En marge d’une note qui fait le point sur la promotion du SECAM et que lui a préparé son conseiller Bernard Esambert, il porte l’annotation suivante : « La course entre le SECAM et le PAL est organisée d’une manière que je commence à comprendre. SECAM : l’ambassadeur de France fait des démarches auprès des autorités du pays concerné, ; il suggère des entretiens entre techniciens, vante la qualité de notre procédé ; les industriels français ne bougent pas et attendent qu’on leur demande d’envoyer éventuellement une mission. PAL :la société allemande productrice s’installe sur place ; offre quelques émetteurs, vend à des conditions spéciales quelques centaines de milliers de postes récepteurs équipés pour le noir et blanc et la couleur. L’heure du choix arrive. Notre mission se déplace et va voir les fonctionnaires et les techniciens. Elle se fait répondre que les appareils émetteurs et récepteurs allemands étant déjà en place, on est au désespoir de ne pouvoir faire plaisir à la France Amie. Voilà pourquoi notre fille est muette. »  Que se serait-il passé, si, par hasard ou par chance, la télévision en couleur était devenue l’un des axes de la coopération entre la France et l’Allemagne ? Si Alain Peyrefitte, ayant surmonté la déception  ressentie sur la vedette voguant sur le Rhin, plutôt que de partir à Moscou en janvier 1965, avait d’abord laissé Walter Brüch et Maurice Rémy évaluer ensemble la possibilité de mettre au point un système commun sur la base du SECAM et du PAL ? Peut-être alors, les équipes d’ingénieurs auraient-elles mis au point un procédé approchant le NIR ? Ils ne l’auraient pas baptisé, PAL, ni SECAM, bien sûr, mais peut-être SEQUAM ? Pourquoi Pas ? Les Britanniques auraient alors peut-être pris leurs billets d’avion pour Moscou. Qui sait ?
Cette histoire est bien sur celle d’un rendez-vous raté entre Paris et Bonn. Les deux nations auront d’autres occasions de se retrouver, plus tard. Car la télévision n’a pas fini de grandir. La couleur n’est pas une fin, ce n’est qu’une étape.

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2 Feb 24 * essais du Sécam17Pascal
6 Feb 24 +* Re: essais du Sécam10François Guillet
6 Feb 24 i+- Re: essais du Sécam1F1TAY
7 Feb 24 i`* Re: essais du Sécam8Thierry VIGNAUD
7 Feb 24 i +- Re: essais du Sécam1François Guillet
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6 Mar 24 i `* Re: essais du Scam5Olivier B.
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