Sécrétions

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Sujet : Sécrétions
De : gcojot (at) *nospam* mac.com.invalid (Gérard Cojot)
Groupes : fr.sci.philo
Date : 09. Feb 2025, 16:27:33
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Le nom du Secret dit qu'on ne peut pas dire. Il parle du Secret sans le
dire. Ou bien ce
nom recouvre des noms comme celui de la Mort, qui, lui aussi parle d’un
indicible.
Mais l’indicible, ici et la n’est pas le meme. La Mort par exemple,
n’est pas une
experience dont on parle parce qu’on la faite. Elle seule du reel est en
dehors de la memoire.
Ce qu’on dit d’elle, la cache. Ca cache le trou qu’elle fait dans
le’Savoir’.
On tourne autour d’un trou. on croit qu’on dit la Mort: on n’en decouvre
que des indices.
On parle d’un cadavre, d’une douleur ....
L’evenement de la Mort etant hors l’atteinte des mots, dire le nom de la
Mort est
s’approcher d’un vide de la Pensee. Le nom de la Mort tue le Sens.
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Tout le temps que le secret est tu, son nom designe aussi un trou dans
le savoir ou
dans le dire. Lui aussi derobe le sens. On tourne autour d’un puits
perdu, creuse par cet autre
nom vide: les mots s’y ecoulent sans reste. On nomme le puits ‘ la
Derobee’.
On tait ce qui fut dit ou vu. Quand on le dit, ca bouche le trou, ca tue
le nom generique du
secret. Ca fait une mort breve dans le vocabulaire.
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Le silence des mots rend impossible l’experience de la Mort, la
decouverte du Secret.
Vous mourez, ca cesse de parler. Vous taisez le secret, nul n’en parle.
Je ne puis vous joindre, vous-meme secret ou mort. Vous etes mure dans
le silence.
L’existence des mots n’a d’autre cause ni d’autre fin: ils departagent
dans ce qu’il advient,
l’inexperience de l’experience.
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Le Jeu du Secret...
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L’acte constitutif du Secret est acte de refus qui implique au moins
deux parties.
Personnes ou groupes lies par un rapport negatif: le detenteur du
contenu du Secret et
le destinataire vise par ce contenu refuse.
Il n’y a pas de Secret en soi sans cible ou destinataire !
Le refus de divulguer le Secret cree une tension qu’il faut maintenir
pour le preserver.
Il existe pourtant trois modes de decharge de cette tension interne.
La decharge est la tendance incoercible du Secret a se frayer un chemin,
une voie, vers
ses destinataires.
Premier mode: La Revelation.
C’est un relachement brusque de la tension qui abolit la separation et
par consequent le
Secret. Elle est aussi une vaine tentative de monnayer le prestige dont
tout detenteur de
secret est credite par ses partenaires.
Tant qu’il se contente de leur signaler l’existence d’une chose qu’il a
et que les autres
n’ont pas.
En revelant le Secret, en fait , il revele qu’il n’a pas et qu’il n’est
pas l’objet susceptible
de combler le manque de ses partenaires.
Aucun Secret ne peut remplir ses promesses en se revelant.
Deuxieme mode: La Communication.
Elle se distingue nettement de la revelation. Au lieu d’abolir la
separation, elle deplace
sa limite et de la sorte, elle preserve le secret dont elle soulage le
poids, dont elle abaisse la
tension.
Elle implique un choix et transforme le Secret en support d’un lien
social ambivalent.
On peut reveler un Secret directement ou indirectement a ses
destinataires: le dire,
l’avouer, le confesser a ceux-ci, ou alors le divulguer et le trahir
devant tout le monde et
n’importe qui.
On ne peut COMMUNIQUER qu'’ a des confidents choisis par decision
collective ou
alors qu’a ceux qui partagent la meme charge ou fonction.
Dans les deux cas, on ne confie le Secret qu’a des depositaires.
En confiant le Secret a autrui, nous ne lui demandons pas seulement de
le conserver
intact et de nous soulager du poids de notre refus. Nous lui demandons
aussi de le prendre
en charge et de le partager, c’est a dire de l’etayer et de le soutenir
de la force de son propre
refus, et, par consequent, de sa propre tentation a le manifester, ne
serait-ce qu'’ en le cachant
devant nos destinataires devenus communs.
Aussi, la Communication qui inaugure le partage a-t-elle pour effet
crucial de transformer
le Secret en fait social doue de certains effets specifiques. Elle le
transforme en objet de
jouissance et d’echange, en chose commune , en lien qui se nourrit de la
tension constante
entre un dehors et un dedans. Elle n’erige pas seulement une regle, elle
reengendre aussi sa
propre condition.
L’adjuvant de cette forme de solidarite, telle que la communication des
secrets
intiatiques, est la tension toujours renaissante ou entretenue entre le
dedans et le dehors.
Autant dire que la confiance engendree par le partage des secrets est a
la mesure de la
resistance que leurs depositaires opposent aux inevitables tentations de
les trahir.
Lorsque la tension monte et que l’heure de la trahison a sonne, elle
peut s’inverser et
transformer les confidents en autant d’agents potentiels des
destinataires de ces secrets.
C’est, ce qui explique, entre autres, l’emergence de la Societe Secrete.
Le serment,
l’education au silence, l’interdiction de communications ecrites,
l’institution de sanctions
formelles. Les epreuves initiatiques ou psychiques impriment la regle du
silence dans la
memoire des societaires.
La fragmentation temporelle et spatiale des secrets, l’initiation
graduelle et le
compartimentage des depositaires assurent objectivement la protection
mais sonne aussi le
glas de la relation egalitaire.
Elle implique la presence d’une hierarchie d’inities separes desormais
par la barriere du
Secret;
Cependant, les mots de passe, les signes de reconnaissance sont la pour
rappeler a
chacun que l’unite n’est pas perdue.
Le dispositif symbolique interne du groupe et plus particulierement son
dispositif
rituelique signe la caracteristique de la Societe Secrete.
A la limite celle-ci protege moins ses secrets primordiaux que les
usages, les regles et
les rituels, c’est a dire les secrets secondaires au moyen desquels,
elle se constitue
durablement.
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La Secretion:
__________
La Secretion laisse echapper, percer, filtrer, fuir.
Elle est sans doute le moyen le plus courant de la regulation et par la
meme de la
preservation du Secret.
Si, la Communication abaisse momentanement cette tension, elle ne la
supprime pas.
La Secretion est l’ensemble des moyens plus ou moins volontaires ou
organises au
moyen desquels les detenteurs ou depositaires du Secret en exhibent des
fragments sans
pour autant le reveler ou le communiquer.
La Secretion se fait au moyen de bribes et de morceaux, de signaux que
nous laissons
filtrer, malgre ou a cause de notre intention de ne rien reveler.
Et ce sont les autres, les destinataires qui constituent ces regards
furtifs, ces airs, ces
manieres, ces paroles ou gestes, en signaux du Secret.
Il y a la vanite des mots dans la transmission du secret, c’est pourquoi
la revelation du
Secret de l’Initiation, hors du moment vecu par un profane, par la
lecture ou par l’indiscretion, le
laisse frustre et desempare.
Les mots, moyen mediatique, mettent un intermediaire deformant entre la
partie la plus
intime d’un individu et celle d’un autre.
Les symboles ou mieux les archetypes repondent deja mieux a cette
utilisation.
On ne peut en fait connaitre l’initiation que comme une experience
immediate, vecue en
commun, simultanement ou successivement, en l’absence de mots.
Ces mots qui travestissent si bien la pensee.
“Le Maitre dont l’Oracle est a Delphes, ne dit rien, ne cache rien, mais
Signifie

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                                         Amitiés, Gérard Cojot 
           'Bienheureux les fêlés, ils laisseront passer ma lumière'[M.Audiard]



Date Sujet#  Auteur
9 Feb 25 o Sécrétions1Gérard Cojot

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