[Edito vidéo] Plaidoyer pour le nucléaire

Nous avons tous eu la tentation de Robinson. Mais à l’âge de raison, le réalisme prévaut. L'édito de Christine Kerdellant, directrice de la rédaction.
J’étais lycéenne lorsque j’ai participé à ma première manifestation anti-nucléaire, en 1976 : les pionniers de l’écologie protestaient contre la construction de la centrale originelle de Flamanville. Les jeunes du Cotentin, qui ne s’étaient pas mobilisés dix ans plus tôt contre l’ouverture de l’usine de retraitement de déchets de La Hague, ne voulaient pas de cette nouvelle « bombe nucléaire » sur leur presqu’île. Puis certains d’entre eux ou leurs proches ont été embauchés, à La Hague ou à Flamanville, et les discours sont devenus plus subtils !
Certes, des rumeurs ont continué de circuler, ici ou là, sur des fuites supposées. Le 29 avril 1986, à la Hague, une mesure de la radioactivité atmosphérique inhabituellement haute au coeur du site a provoqué son évacuation… Jusqu’à ce que l’on découvre que l’air, à l’extérieur, était plus contaminé qu’à l’intérieur ! C’était le nuage de Tchernobyl qui passait sur la France et augmentait (de moins de 1 Bq/m3, le taux le plus faible du pays) l’activité radioactive sur la péninsule.
Nous avons tous eu, un jour ou l’autre, la tentation de Robinson. L’envie de décroissance s’envole dès que l’on voyage dans des pays qui vivent avec deux heures d’électricité par jour. Même les écologistes convaincus que les smart grids et les énergies renouvelables pourraient assurer un approvisionnement régulier et suffisant sont revenus au réalisme : il faudrait pouvoir stocker massivement l’énergie produite écologiquement pour y parvenir, et c’est actuellement impossible.
Derrière chaque éolienne, il y a une centrale à gaz. Ou presque ! Il s’agit parfois d’un barrage hydraulique… On en connaît la raison : comme une éolienne ne tourne que 22% du temps en moyenne, il faut des centrales classiques, des « thermiques à flamme » pour prendre le relais.
Le nucléaire n’a pas fait plus de morts que l’éolien et le solaire. Les catastrophes de Tchernobyl ou de Fukushima ont certes fait des victimes, difficiles à chiffrer car des personnes souffrent encore aujourd’hui de cancers liés à la radioactivité. Mais selon une étude publiée en 2013 par la revue scientifique Environmental Science & Technology, l’utilisation de l'énergie nucléaire a permis de sauver 1,84 million de vies, de 1971 à 2009. Pushker Kharecha, et James Hansen, chercheurs à la Nasa, ont calculé que le nucléaire n’aurait tué « que » 4900 personnes, et ont extrapolé le nombre de morts de mineurs, de décès liés à la pollution, etc. qui auraient eu lieu si des centrales à charbon ou à gaz avaient été mises à contribution.
47% des Allemands y sont redevenus favorables… pour le climat ! Parce qu’il faut aller vite et qu’ils savent que le nucléaire n’émet pas de CO2, les Allemands (qui ont fermé toutes leurs centrales nucléaires sauf une, et font tourner des centrales à charbon ou à gaz en même temps que leurs ENR) se posent maintenant des questions…
Le nucléaire est un atout majeur pour la France. Si nous sommes un bon élève du climat, c’est entièrement grâce au nucléaire… Et notre électricité moins chère qu’ailleurs, est un facteur d’attractivité non-négligeable.
Après la fission viendra la fusion. L’Agence internationale de l’énergie atomique vient de revoir ses chiffres à la hausse et estime que la capacité nucléaire à des fins de production d’électricité va doubler d’ici à 2050. En attendant que l’industrialisation de la fusion nucléaire prenne le relais, fournissant une énergie propre et inépuisable…
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