Sujet : Re: Ukraine
De : juste (at) *nospam* le.bref (Lebref)
Groupes : fr.soc.politiqueDate : 12. May 2025, 20:14:05
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P Cormoran :
Lebref :
P Cormoran :
Lebref :
Si vous voulez agresser Poutine et lui fournir des prétextes pour
surenchérir, je n'y vois pas d'inconvénient, c'est un choix, mais ne
vous plaignez pas des conséquences dont vous chérissez les causes.
Donc, si un pays envahit, bombarde, annexe et déporte, la faute
reviendrait à ceux qui lui résistent ou le sanctionnent ? C’est
exactement le raisonnement que les dictatures adorent entendre : la
responsabilité des violences pèserait non sur l’agresseur, mais sur ceux
qui refusent de céder. Ce n’est pas du réalisme, c’est une abdication
morale. Poutine ne "surenchérit" pas parce qu’on le provoque, il le fait
parce que c’est le coeur de sa stratégie.
>
Oui, aussi, mais si vous tendez le bâton à Poutine, n'attendez pas qu'il
n'en use pas pour vous fustiger.
>
Notez cependant que là nous tournons en rond dans l'argumentation.
>
Deux remarques d'ordre plus général relatives à notre échange, dont vous
ferez ce que bon vous semblera, ou pas :
>
- vous utilisez souvent le terme de dictature, dont je devine qu'il porte
un jugement négatif sur le régime concerné, mais il me semble que ce point
n'a qu'une importance assez secondaire, les démocraties bourgeoises ayant
très souvent fait la démonstration dans les relations internationales
d'une absence de scrupules qui n'a rien à envier aux régimes qualifiés
d'autoritaires ou dictatoriaux.
>
- vous vous placez régulièrement sur le terrain moral, intimement persuadé
de votre (devrais-je dire notre ?) supériorité sur ce plan, mais là encore
c'est extrêmemnt discutable et n'apporte qu'assez peu au débat dans un
rapport de force et une situation conflictuelle ouverte.
Vous avez raison sur un point : les démocraties ne sont pas exemptes de
compromissions ou d’hypocrisie — la realpolitik n’est pas l’apanage des
régimes autoritaires. Mais la forme d’un régime n’est pas un détail :
dans une démocratie, il existe au moins des contre-pouvoirs, une presse
libre, une société civile, des élections contestables — autant de choses
impossibles en Russie. Cela ne garantit pas la vertu, mais cela permet
la contestation, la sanction, le débat. Ce n’est pas secondaire, c’est
structurant.
Oui, mais non, le problème auquel nous sommes confrontés est qu'en état de
guerre, la démocratie disparaît, elle s'efface derrière les nécessités de
l'unité dans le combat. Vous pouvez invoquer la démocratie en Ukraine,
mais depuis quand n'y a-t-il pas eu d'élections ? La presse y est-elle
encore libre ? Chacun peut-il contester ouvertement le gouvernement ?
Quant à la morale, je n’ai pas besoin d’invoquer une supériorité
abstraite. Mais si on renonce à toute boussole éthique sous prétexte que
"tout se vaut" ou que "le monde est cynique", alors il ne reste que la
loi du plus fort. Et dans ce cas, pourquoi blâmer Poutine ? Pourquoi
même discuter ? Si on accepte que seul le rapport de force compte, alors
il faut aussi accepter la guerre comme mode d’arbitrage permanent. Moi,
je refuse cette résignation.
Quand Poutine agresse ou que Netanyahou bombarde, la morale permet
peut-être de se positionner, mais là encore quel impact a-t-elle ?
Si Poutine envahit, qui va sérieusement contester à l'Ukraine le droit de
se défendre ? Si Netanyahou bombarde des civils, qui va sérieusement
contester au Hamas le droit de ... non, d'accord, là ça ne fonctionne
plus. (Gaza n'est là que pour illustrer mon propos, ne le prenez pas mal)
La morale c'est toujours le risque de tomber dans le deux poids, deux
mesures.